COURTEUIL
Encre de Chine - Mr BOUROUX -1910-
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SENLIS et ses environs...

Extrait de l'ouvrage intitulé "Senlis et ses environs",
paru en 1896, par Eugène Muller (1834-1918), chanoine à Senlis en 1876,
puis premier vicaire de la Cathédrale Notre-Dame de Senlis en 1877


    .....Saint-Nicolas-d'Acy, Aciacus, montre bientôt à gauche, le grand mur du prieué qu'avait fondé en 1098, Robert, vidame de Senlis, baron de Survilliers et seigneur d'Acy. L'effigie sépulcrale du "trés insigne Guy de la Tour,", qui fut comme le restaurateur de ce prieuré, après avoir servi trop longtemps de cible aux enfants, a trouvé un abri dans un coin de l'église de Courteuil. " Ici, " disait son épitaphe en vers léonins,

" ici git l'illustre GUI, surnommé de la Tour,
qu'il trouve pitié auprès du Christ, né de la Vierge ".

" Hic jacet egregius Guido de turre vocatus,
Cui sit propitius Christus de Virgine natus ".

DuRûel nous a conservé une liste des prieurs que l'abbé Vattier a éclairé par des notes.

De l'église que Nicolas Sanguin, avait dédiée en 1626, il ne reste pas une pierre.

Dom-Grenier mentionne que dans la nef près le portail à gauche en entrant, il a lu une inscription latine donc voici la traduction :
" Ici gît D. Antoine Prévost, prêtre de l'ordre majeur de Saint-Benoit, moine profès, connu pour les très nombreux ouvrages qu'il a mis au jour. Il mourut le 25 novembre 1763. Qu'il repose en paix ! "
Il avait peu connu cette paix jusqu'alors.

Pourquoi le vocable de Saint-Nicolas à ce hameau frais et agréablement accidenté?   Vous trouverez parmi les procès célèbres que la justice d'autrefois a faits à des animaux, celui que le bailli de Saint-Nicolas intenta, c'était le 27 mars 1567, contre une truie homicide.
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    Nos annales font mention de Courteuil, Curtesolium (1060), Curtoïlum (1138), Curteolum (1168), petit courtil, dès 860, époque où Charles-le-Chauve donne l'abbaye de Saint-Denis " la villa du Cortilion, villa Cortilionis ".

    L'église est digne d'une visite raisonnée. Choeur et avant choeur des début du XIII ème siècle. Addition du XV ème siècle et des siècles suivants. Fonts des XIII ème et XIV ème siècles. Belle statue de la Vierge du XIV ème siècle, soutenant d'une main l'Enfant-Dieu qui serre une pomme entre ses doigts, et présentant de l'autre un livre ouvert : pourquoi a-t-on badigeonné ce groupe élègant et fin d'une couleur blanc cru ? Monuments et dalles funéraires curieux.

La dalle devant le choeur porte cette légende en vers :

"   Cy gist un gentil escuyer
    Qu'on nomait François Waroquier
    Qui de lartois province hautaine
    Issoitde moult noble origenne
    Et fut dartillerie et guerre
    Pour le Roy loial commissaire
    Et lee servant en ceste guise
    Acquit grand los par sa franchise   "
, etc.


    François de Waroquier, seigneur de Mericourt en Artois, commissaires des guerres et de l'artillerie (1554), était fils de Wast de Waroquier et d'Anne du Moulinet, et avait épousé Anne Thibault, de la famille des Thibault, seigneurs de Néry. Les armoiries qui décorent les angles de cette dalle sont, en bas à gauche de [azur] à une main [d'argent] qui est de Waroquier; à droite, parti à dextre d'une main appaumée(1), à gauche de... a une fasce de... chargée de trois merlettes qui est de Thibault; en haut à gauche, écartelé aux 1 er 4ème de Waroquier, au 2ème et 3ème de... à trois fleurs de lys posées deux et un qui est...; enfin à l'autre et dernier angle, parti à dextre de Waroquier, à senestre de Moulinet qui est de... à trois anilles ou fers de moulin.

    Autre monument de frère Jean Mathon
, représentant en demi-bosse un gisant et deux religieux qui prient pour son âme. MCCCCIIIIxx...

     la croix toute simple, au bord de la grande route, rappelle la mort, le 25 novembre 1763, de l'abbé Prévost, l'auteur désabusé et repentant de Manon Lescaut;

" L'abbé Prévost " dit la marquise de Créquy, " que j'ai rencontré deux ou trois fois dans ma vie, était un gros homme à figure sombre, avec une voix lugubre; il était assez bien vêtu pour un auteur de son temps. On racontait de lui des choses étranges... Tout ce que je sais de plus calamiteux sur l'abbé Prévost, c'est qu'il est mort d'une horrible manière. Il avait été saisi d'apoplexie dans le bourg de Royaumont, non loin de Chantilly; il fut transporté chez le curé du village, où le bailli des moines arriva pour instrumenter de sa profession, et d'où ce justicier de malheur envoya requérir le chirurgien de l'abbaye pour venir procéder à l'ouverture du corps, afin qu'il ne manquât rien à la perfection de ce procès-verbal... "

    La verité historique exige que l'on n'accorde au récit satirique et macabre de la marquise de Créquy qu'un crédit relatif. Les Affiches du Beauvaisis, à la date du 12 mars 1787, protestent avec une belle indignation contre le trait final.
" Le sieur abbé Prévost ", dit le rédacteur de ces Affiches, " fut frappé d'une apoplexie qui le renversa sans vie sur la route de Saint-Firmin à Senlis, vis-à-vis la croix de la paroisse de Courteuil, et non au pied d'un arbre dans la fôret de Chantilly. M. de Saint-Leu, curé de la dite paroisse, fit porter dans son presbytère le corps, qu'on essaya de rappeler à la vie par tous les moyens et secours usités en pareil cas. C'est le lendemain qu'on procéda à l'ouverture du cadavre ".

    Christian, qui, selon l'adage des anciens et de Santeuil," a chatié de son rire les moeurs " de l'époque, habitait ce petit château et cette tourelle dentelée de creneaux innoffensifs.

    Courteuil a eu pour seigneurs : Jean de tournebus (1279), Guillaume de Chantilly (1346), etc,....
(1) D'où le proverbe : "Je te donneray les armoiries de Varoquier", c'est-à-dire une main appliquée sur la joue.
Novembre 2008